Le Monde d'Hier et de Demain

Publié le par Ecriture ouverte

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"Nous, jetés à travers tous les rapides de l'existence, nous, arrachés à tout enracinement, nous qui recommençons à partir de rien chaque fois que nous sommes acculés à une impasse, nous victimes, mais aussi serviteurs volontaires de puissances mystiques inconnues, nous pour qui le bien-être est devenu une légende et la sécurité un rêve puéril, nous avons éprouvé dans chacune des fibres de nos corps la tension d'un pôle à l'autre et le frisson de l'éternel nouveauté." (p.44, Le Monde d'Hier, Stefan Zweig, Livre de Poche)
 
     
   A la lecture de ce livre, Le Monde d'Hier de Stefan Zweig, on est vite emporté dans son époque, dans son histoire personnelle, mais celle aussi des Hommes, celle des artistes et des écrivains, celle de son pays et finalement celle des Juifs. De manière chronologique, il retrace les événements avec un oeil alerte et perçant, tout en ajoutant cette finesse d'esprit et parfois nous faisant revivre ses émotions d'enfant, de jeune adolescent et de jeune homme débutant dans une vie bien frénétique et propre à sa personnalité.
 
La citation que j'ai indiquée ci-dessus révèle ce qui se dégage de ce mémoire, mémoire qu'il a voulu tendre vers l'Humanité. Mais au delà de ça, il nous fait comprendre que chaque époque de la vie est parsemée par ses guerres, ses tensions politiques, ses arts, ses pensées, sa folie, qu'elle est imprégnée dans notre chair, et que nous la vivons entièrement sans que nous en soyons réellement conscient. Il est probable que cette prise de conscience de Stefan Zweig était due au fait qu'il a vu deux époques distinctes, celles de la Première Guerre Mondiale, et celle de la Seconde Guerre Mondiale. Il décrit bien sûr la période de transition entre ces deux guerres, mais il semble qu'il ne la considère pas comme une époque, mais bien comme une pause, un alinéa... quelque chose qui semble hors du temps. Et c'est d'ailleurs tout ce décalage qu'il décrira, cette douce vie retrouvée. A l'aube de la guerre, il y règne une paix, une sérénité difficile à décrire. Il fait beau et les gens semblent heureux, alors que le chaos ne tarde pas à dévoiler ses multiples facettes.
 
  
     A la fois critique sur la société autrichienne et sur sa politique, il garde un oeil bienveillant sur son pays, et même dans son exil, on ressentira la souffrance, la douleur d'avoir perdu un ami. L'exil est comme le fer marqué sur la peau. Il ne vous fait pas d'amis et vous êtes davantage perdu que soulagé d'avoir été sauvé ou d'avoir pu fuir. Comme souvent, il est tellement facile de se plaindre de notre propre pays, mais lorsqu'il n'est plus là, nous nous sentons comme des enfants abandonnés, esseulés, et nous le désirons plus que tout, car il appartient à notre chair. L'auteur nous fait comprendre que notre pays n'est pas une entité dénuée de sens, juste un papier, une carte d'identité... Le pays est comme un être vivant, car il est rempli de ces multiples vies qui le façonnent de siècle en siècle. Et malgré ses travers, il reste l'origine de notre être. J'ai donc été touchée par ce témoignage d'un homme qui a vécu pendant les guerres, vu son pays tombé peu à peu dans la déchéance et le nazisme, et écrire au moment de son exil que son pays restera son foyer à jamais perdu.
 
 
    Enfin, je vous invite à lire cet ouvrage, car vous trouverez une mine d'or en ce qui concerne les artistes et écrivains de l'époque, tels que Romain Rolland, Emile Verhaeren, William Blake et Peter Hill, décrits sous l'oeil sensible et avide de Stefan Zweig. Il y a un magnifique tableau de Rodin qu'il a été amené à rencontrer. Je ne vous en dirai pas plus. A lire la tête posée. Ne soyez pas pressé.
 
 
Merlin
 
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